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"L’honneur perdu de Katharina Blum" ou l’impact des médias
53 min
Disponible jusqu'au 14/04/2025
- Version française
En 1974, l'écrivain allemand Heinrich Böll raconte l’histoire d’une jeune femme qui aide un criminel recherché à s’enfuir après avoir passé la nuit avec lui. Cinquante ans après sa parution, un passionnant retour sur ce best-seller immédiat et brûlot précurseur contre la désinformation.
"Les faits qu’il serait peut-être bon de commencer par exposer sont brutaux : le mercredi 20 février 1974, en pleine période de carnaval, une jeune femme de 27 ans quitte son appartement pour se rendre à une fête [...]. Quatre jours plus tard [...], elle sonne à la porte de Walter Moeding, commissaire de la brigade criminelle, et déclare de but en blanc avoir le jour même abattu chez elle le journaliste Werner Tötges." En 1974, l’écrivain allemand Heinrich Böll, lauréat du prix Nobel de littérature, raconte dans L’honneur perdu de Katharina Blum l’histoire d’une jeune femme qui aide un criminel recherché à s’enfuir après avoir passé la nuit avec lui. Arrêtée et humiliée par la police, elle est prise pour cible par le tout-puissant tabloïd Le journal – pseudonyme transparent de Bild, le navire amiral du grand groupe de presse Springer –, qui orchestre contre elle une campagne de haine et de diffamation, la poussant à tuer le journaliste qui en est à l’origine. Sous-titré Comment peut naître la violence et où elle peut conduire, ce récit aussi bref que percutant touche la société allemande en plein cœur ; il devient un best-seller immédiat, porté à l'écran un an plus tard par les cinéastes Volker Schlöndorff et Margarethe von Trotta. Avec en toile de fond jamais explicitement nommée la guerre que l'État ouest-allemand mène contre le terrorisme d'extrême gauche de la Fraction armée rouge (RAF), Heinrich Böll dresse le réquisitoire d'une presse à sensation qui recourt à la désinformation pour clouer au pilori ses ennemis politiques, au service d'un pouvoir oppressif et de sa police, dans une société patriarcale révulsée par le féminisme naissant. L'écrivain s'est lui-même retrouvé quelques années plus tôt en butte aux attaques virulentes de Bild pour avoir dénoncé la répression des révoltes étudiantes en 1968, puis les lois d'exception antiterroristes.
Abus de pouvoir
"Le principe d’abandon du pouvoir et de la domination pourrait peut-être faire avancer le monde", suggérait Henrich Böll (1917-1985), dont la défense passionnée de l'individu et de ses libertés civiques reste d'une brûlante actualité. Anarchiste et pacifiste, féministe "sans le savoir", celui qui avait dû combattre pour le IIIe Reich durant la Seconde Guerre mondiale avait payé cher son soutien sans réserve vingt ans plus tard à la jeunesse allemande réclamant, entre autres, la dénazification de la société. Cette anatomie fouillée du livre et de son succès met en regard le contexte social et historique de l'époque avec la réalité contemporaine et le rôle qu’y jouent les fake news, la manipulation politique et la haine en ligne. Au travers d’extraits du texte et du film, ainsi que d’archives d'entretiens avec l'écrivain, commentés notamment par Volker Schlöndorff et Margarethe von Trotta, mais aussi la journaliste et militante antiraciste Rokhaya Diallo ou l'écrivaine Anne Rabe, le documentaire livre ainsi une analyse pleine de finesse des ressorts du harcèlement, de la désinformation et de l'abus de pouvoir.
Réalisation
Cordula Echterhoff
Birgit Schulz
Pays
Allemagne
Année
2024
Des grands classiques aux romans à scandales