11 Underground

Le 30 juillet 1984, à Almadén, au centre de l’Espagne, onze mineurs décident de passer onze jours dans les profondeurs de la plus grande exploitation de mercure au monde pour réclamer des hausses de salaire et de meilleures conditions de travail. Dans ces galeries sombres et toxiques, la vie peu à peu s’organise, avec le soutien moral et logistique des proches restés à l’extérieur, jusqu’à la victoire qui transforme les grévistes en héros locaux. Quarante ans plus tard, après la fermeture de la mine en 2003 et l’échec patent du plan de reconversion, la cité en déshérence sombre dans l’oubli, jusqu’à ce que le réalisateur Chico Pereira propose aux petits-enfants des mineurs une expérience cinématographique inédite, les invitant à revivre, en forme d’hommage à leurs aînés, cette lutte exemplaire. Avec lui, dix d’entre eux – femmes et hommes – descendent ainsi à leur tour sous terre pendant onze jours. Comme les grévistes avant eux, ils installent un camp de fortune, dorment sur les mêmes lits que leurs grands-pères et commencent à tisser de profonds liens de solidarité.

La force du passé
Dans quelle mesure le passé peut-il inspirer une communauté, voire transformer son avenir ? Étrange processus que celui amorcé par le cinéaste espagnol Chico Pereira, revenu sur sa terre natale dans le désir de raviver la mémoire de ce combat historique. Car au fil des jours, les descendants des mineurs se laissent envahir par la nostalgie dans ce huis clos souterrain où l’esprit de la lutte flotte encore, remuant corps et âmes. Entre parties improvisées de football, jeux et confidences émues à la lueur des bougies, la petite communauté se fédère dans la mine, quand son discours, qui mêle intimement le politique à l’affectif, se fait de plus en plus revendicatif. En surface, les anciens, touchés au cœur par l’initiative, convoquent leurs souvenirs, tandis que les familles se retrouvent avec une énergie renouvelée autour du puits pour aider les activistes en devenir. Sur fond de chômage et d’exode des jeunes, tous exigent des pouvoirs publics qu’ils agissent pour revitaliser leur cité laminée par l’ère postindustrielle. Des manifestations appuient la mobilisation, relayée par des médias. Faut-il dès lors prolonger le mouvement au-delà des onze jours ? Une passionnante exploration des ressorts de la mémoire collective pour réinventer le futur.